Les cinq sens pour des scènes en multidimensions
Pour beaucoup d’auteurs, les descriptions sont une véritable torture à écrire.
Trop longues et trop détaillées, elles ennuient les lecteurs et font décrocher ;
Trop courtes ou pas assez nombreuses, et le lecteur se retrouve perdu.
Alors, comment faire pour rédiger des descriptions captivantes ?
Plusieurs facteurs rentrent en ligne de compte : l’utilisation de verbes précis (cf. l’article sur les verbes pauvres), la caractérisation du personnage, l’utilisation du mouvement, etc.
Aujourd’hui, nous allons nous pencher sur une question précise : comment écrire des descriptions captivantes grâce aux cinq sens !
Petit indice : c’est un peu comme passer d’un vieux poste télé en noir et blanc à un cinéma en 4D !
Les 5 sens & comment les utiliser
L’importance des sens
Les sens jouent un rôle primordial pour toi : ils sont responsables de la perception de ton environnement et donc de tes décisions !
C’est grâce à ton ouïe que tu perçois l’ambulance qui arrive à pleine vitesse et choisis d’attendre pour traverser la route.
C’est ton sens du toucher qui t’avertit qu’il fait particulièrement froid aujourd’hui et te conduit à enfiler une doudoune. Sans lui, tu gèlerais à l’arrêt de bus et terminerais cloué.e au lit avec un bon rhume !
Et pourtant, tu as tendance, comme nous tous, à sous-estimer le rôle de tes cinq sens.
C’est d’ailleurs logique !
Tu ne penses pas systématiquement à tes mains lorsque tu attrapes un objet ? Ou à ta respiration ?
De la même manière, tes sens font partie intégrante de ton quotidien, au point que tu as tendance à oublier leur importance.
Dans cet article, je te propose donc d’aller au-delà de tes habitudes et de reprendre contact avec tes cinq sens. Tiens-toi prêt à les redécouvrir.
C’est parti !
Les cinq sens : quels sont-ils ?
Observe l’image ci-dessous. Décris-la en quelques phrases. Puis lis la suite.
Tu as probablement évoqué le pont qui enjambe le ruisseau, les rayons du soleil qui traversent les feuilles de l’arbre, et le sentier qui serpente parmi les herbes.
Mais as-tu pensé à décrire le clapotis de l’eau ou le bruissement des feuilles sous le vent ?
As-tu songé à la douceur de l’herbe ou à la chaleur des rayons solaires contre ta peau ?
Et cette odeur de printemps qui éveille tes sens et te donne envie de goûter à l’eau de source ? En as-tu parlé ?
Si oui, c’est parfait ! Tu as l’habitude de jouer avec tes perceptions. Mais lis tout de même la suite. Je te montrerai comment aller plus encore loin !
Si tu n’as pas utilisé tous tes sens : tu es au bon endroit pour apprendre à le faire !
En réalisant cet exercice, la plupart d’entre nous se seront bornés à une description physique du lieu.
Et pour cause, la vue est le sens dominant chez l’être humain.
Nous l’utilisons en abondance dans nos textes… Souvent au détriment des autres sens !
Voici donc un petit rappel, des sens que tu aurais pu utiliser pour décrire l’image :
- La vue ;
- L’ouïe ;
- L’odorat ;
- Le goût ;
- Le toucher ;
Ce sont les cinq sens classiques.
Mais tu es auteur, alors n’hésite pas à ajouter d’autres types de perceptions à tes personnages lorsque cela sert l’intrigue !
Voici quelques exemples :
- L’intuition ou la divination ;
- L’électromagnétisme ;
- L’énergie ;
- Etc.
À toi de créer et d’inventer tes propres perceptions !
Attention cependant : pour se lancer dans ce genre d’aventure, il faut déjà savoir maîtriser et utiliser les cinq sens de base. Si tes descriptions ne comportent que des éléments physiques et ton “nouveau sens”, le lecteur pourra se retrouver perdu ou avoir l’impression que tes descriptions sont artificielles.
Un sens dominant
Tu viens de le voir : une grande majorité d’auteurs favorise la vue.
Mais pas tous !
Explications !
La vue est LE sens le plus stimulé dans notre société. Pour s’en rendre compte, rien de plus simple : tu es actuellement en face d’un écran, que ce soit celui de ton ordinateur, de ta tablette ou de ton téléphone. Tu as déjà vu au moins dix pubs dans la journée. Tu LIS ce texte.
Les porteurs de lunettes s’en rendent bien compte : difficile de se passer de sa monture quand on a vraiment une mauvaise vision.
Mais la vue n’est pas seule !
Pour enchaîner dans la même veine, un second sens est particulièrement mis en avant dans notre société… l’ouïe ! La preuve : allume ton ordinateur, choisis une série, regarde une pub.
Quels sont les deux sens stimulés à chaque fois ?
BINGO !
La vue… Et l’ouïe.
Tu es conditionné.e pour penser avec ces deux sens.
C’est donc, tout naturellement, qu’ils se retrouvent en majorité dans les descriptions des auteurs débutants !
Quid des autres sens ?
Si la vue et l’ouïe restent les sens les plus stimulés dans notre société moderne, il n’en reste pas moins que nous possédons trois autres sens, tout aussi essentiels !
Nous les utilisons également au quotidien. Ils sont seulement moins mis en avant et il est donc parfois plus difficile d’en avoir conscience.
Si tu fais partie des gens sensibles aux odeurs, comme moi, tu auras pourtant tendance à utiliser ce sens en abondance dans ton texte.
Tu ne vois pas le monde comme moi.
Et c’est là le point important.
Tu ne le perçois pas à travers les mêmes sens que tes proches.
Tu as une sensibilité différente de celle de ton lecteur.
Cette vision du monde se retrouve dans ta façon d’écrire et de décrire. C’est pourquoi il est important que tu prennes conscience du ou des sens que tu utilises en majorité. Pas pour te forcer à changer ta vision du monde. Pas pour t’obliger à utiliser systématiquement tous les autres sens.
Mais pour rendre ton récit plus immersif, quel que soit ton lecteur.
Car même si tu utilises en premier certains sens, ton cerveau, comme celui de ton lecteur, est habitué à traiter les informations de chacun de tes sens.
Livrer des indications les stimulant dans ton récit, donnera une illusion de réalité à ton histoire et aidera ton lecteur à plonger dans l’aventure aux côtés de ton héros.
Des descriptions captivantes grâce aux cinq sens : explications !
Une ambiance plus immersive pour un max d’émotions !
Un peu comme au cinéma, lorsque vous passez d’un film en noir et blanc à un film en 4D !
Tu viens de le voir : une scène qui stimule les cinq sens donne l’illusion de la réalité et rend ton récit plus immersif.
Ici, non seulement le lecteur peut voir et entendre, mais il sent, goûte et touche comme votre personnage. Ses sensations vont réveiller chez lui la mémoire des émotions.
Tu l’auras compris : le lecteur sera plus touché par ton récit.
Voici un exemple pour mieux appréhender l’idée :
Exemple en 2D :
Le désordre. C’est ce qui choqua Marie, lorsqu’elle pénétra dans la taverne. Les bancs étaient en vrac, repoussés au gré de l’ivresse des clients. Sur la gauche, une table s’était retrouvé les pieds en l’air, sans doute à la suite d’une rixe. Elle s’approcha du comptoir et grimaça : l’homme à ses côtés avait le nez si rouge qu’il aurait pu éclairer la pièce. Ses cheveux et ses vêtements étaient crasseux. Heureusement, elle n’avait qu’un message à transmettre et elle pourrait ressortir. Du coin de l’œil, elle avisa le patron et lui fit un signe de main.
En 5D :
Marie poussa le battant en bois pour pénétrer dans la taverne. Les relents d’alcool et de sueur lui sautèrent au visage. Prudente, elle avança un pied et tâta le sol poisseux de sa semelle. Du sang, encore frais, si elle en jugeait par l’affreux goût métallique qui lui envahit le palais. Évitant la flaque, elle s’avança jusqu’au comptoir parmi les restes de nourriture. Comment pouvait-on manger dans un lieu aussi crasseux ?
— Une aut’ bière !
Le beuglement émanait de l’homme à ses côtés. L’estomac de Marie se contracta lorsqu’elle tourna son visage vers le sien. Une puanteur abominable s’échappait des fripes trouées qui lui servaient d’habits.
— Z’avez souaf’ ? demanda-t-il d’une voix sifflante.
Ses poils se hérissèrent. Quelque chose dans le ton de sa voix la mettait mal à l’aise. Elle devait s’acquitter de sa mission et partir.
Vite.
Avisant le patron à quelques mètres, elle leva le bras et lui fit signe d’approcher.
Un récit plus inclusif ou pourquoi utiliser les autres sens ?
Eh bien, déjà, parce que nous ne sommes pas tous sensibles aux mêmes stimuli. Malgré toutes les observations précédentes, nous avons tous une manière de penser et d’aborder le monde différemment. Je suis particulièrement sensible aux odeurs, mais ce n’est peut-être pas ton cas ! Une troisième personne sera attachée au goût, une quatrième au toucher.
Chaque individu a sa propre sensibilité.
Chaque personnage aussi.
Jouer sur tous les sens permet donc d’inclure des lecteurs aux sensibilités différentes. Ce serait dommage de s’en priver !
Aide à comprendre le personnage :
Les sens peuvent t’aider à caractériser tes personnages. Une petite fille ne perçoit pas son environnement comme une grand-mère !
Utiliser les 5 sens de façon différente selon les personnages est aussi une bonne façon de faire comprendre à ton lecteur qui dirige la scène.
Est-ce mémé Gertrude ?
Ou Julie, sa petite-fille ?
Rien ne vaut une petite démonstration :
1- Elle s’avança dans le jardin, en riant. Les herbes chatouillaient ses pieds nus et la fraîcheur des brins lui procurait un sentiment de bien-être sans nom. Intriguée par une odeur, elle leva le nez vers le ciel. Ça sentait bon la saucisse !
2- Prenant appui sur le battant de la porte-fenêtre, elle enjamba la marche. Le verre, froid, la fit frissonner malgré la douceur de ce mois de mai. Elle poussa un soupir à peine audible. Plus qu’à trouver le barbecue. Inutile d’essayer de repérer la fumée. Elle ne verrait pas un canard à trois mètres. Pas avec sa vue qui continuait de baisser. En grommelant, elle décida de suivre l’odeur de fumée. Gérard avait encore oublié de surveiller la viande…
Alors tu as deviné quelle description correspond à Gertrude et laquelle correspond à Julie ?
Comment travailler tes descriptions avec chacun des 5 sens ?
Passons maintenant au point pratique : comment utiliser chacun des sens ?
La vue
Ce que nous faisons (presque) tous intuitivement :
Si je te demande de décrire un personnage, comment t’y prendras-tu ?
Tentons l’expérience !
Pense à Jammy, un homme de 45 ans. Décris-le brièvement en utilisant ce qui te passe par la tête, sans chercher à rendre ta description captivante (le but est ailleurs pour cet exercice.).
Lis ensuite le passage suivant :
Jammy était grand. Géant même. Du haut de ses deux mètres dix, il impressionnait la plupart des personnes qu’il croisait. Il faut dire qu’avec son gabarit, il avait les épaules larges et des bras aussi imposants que des cuisses, il avait de quoi intimider. Pourtant, il était doux comme un agneau et cette gentillesse était visible à quiconque se donnait la peine de dépasser sa première impression. Son visage avait gardé les rondeurs de la jeunesse et il possédait un petit nez retroussé qui n’allait pas du tout avec l’idée que l’on se faisait d’un dur à cuire. Il était aussi doté de magnifiques yeux bleus, brillants d’empathie, qui semblaient sans cesse s’enquérir de votre bien-être. Et si vous ajoutiez à cela ses cheveux dorés comme le blé d’été et arrangés en bouclettes désordonnées, il était impossible de ne pas craquer pour lui.
Ton texte s’approche-t-il du mien ?
Je ne parle, bien sûr, pas de la description en elle-même. Ton Jammy est peut-être petit, roux, asiatique, voire si tu es imaginatif, même pas humain !
Non, je faisais référence à la manière dont tu as décrit le personnage.
As-tu abordé la forme de son visage, de son nez, de ses yeux ? La couleur de peau, des cheveux et des yeux ? Sa taille ?
Si tu as répondu oui, c’est normal ! Nous avons tous tendance à décrire ce que nous voyons en termes de formes statiques et de couleurs basiques. Du moins au début…
Mais tu peux aller plus loin dans l’utilisation de la vue !
Comment ?
- En décrivant le mouvement, la posture, l’attitude, le langage corporel, par exemple.
- Pense aussi à ajouter des nuances dans les formes et couleurs : des reflets, des couleurs changeantes, des illusions d’optique, des jeux de perspectives, d’angles, etc.
- Joue avec le zoom ! Dans mon exemple, je reste toujours à la même échelle pour décrire Jammy. Mais tu peux très bien changer la distance avec laquelle tu le décris au cours de ton texte. Par exemple, tu peux partir d’un plan large puis rentrer dans le détail, ou l’inverse !
Astuce : Parfois, donner quelques détails spécifiques au lieu de dresser un portrait global permet une meilleure immersion pour votre lecteur. En effet, à moins que tu ne parles d’une créature parfaitement nouvelle, ton lecteur est capable d’imaginer qu’une licorne possède un corps de cheval et une corne sur le front ! Mais spécifier un point qui la différencie des autres licornes l’aidera à mieux visualiser la scène !
- Et enfin, pense aux différentes façons de décrire : tu peux rester factuel ou plonger ton lecteur dans la tête d’un des personnages. Il ne verra alors pas la scène de la même façon !
Exemple de description d’un être humain : montre le grain de beauté qu’il ou elle a sur la joue, la cicatrice discrète qu’il cache sous ses mèches de cheveux, l’ongle cassé qui dénote avec le reste de son attitude soignée, ou le pan de sa veste déchirée. Tu feras ainsi naître des questions dans la tête de ton lecteur : d’où vient cette cicatrice ? Pourquoi son manteau est-il dans cet état ?
Exemple : une façon très simple d’illustrer ce propos : prenons le cas de Grâce.
Point de vue (pdv) factuel :
Les têtes se tournaient souvent sur le passage de Grâce. Il faut dire que la jeune femme était d’une beauté singulière. Elle semblait tout droit sortir des flammes d’un brasier : son corps élancé paraissait presque noir sous une tignasse de cheveux aux reflets de feu. Et, lorsqu’elle tournait la tête dans votre direction, c’était pour vous transpercer d’un regard bleu azur, presque translucide.
Pdv de Grâce :
La jeune femme tourna la tête vers le miroir et soupira en croisant son regard bleu perçant. Aucune des couleurs de fard à paupières ne semblait parvenir à diminuer l’éclat de ses yeux. Guillaume, l’homme avait qui elle avait rendez-vous dans moins d’une heure, aller prendre peur. Comme tous les autres hommes avant lui. Dans une tentative désespérée pour paraître moins “bizarre”, elle attrapa un foulard noir et s’appliqua à en coiffer ses cheveux. La couleur sombre atténuerait le côté flashy de ses boucles rousses. Du moins, elle l’espérait. Enfin, elle se pencha pour attraper une paire d’escarpins, puis se ravisa. Sur son profil Tinder, Guillaume avait indiqué mesurer un mètre quatre-vingt-douze, soit sa propre taille si elle se perchait sur cinq centimètres de talons. Avec un nouveau soupire, elle saisit une banale paire de ballerines et se redressa. Elle était prête.
Pdv de Guillaume :
La jeune femme installée en face de lui était la plus belle personne qu’il lui eut été donné de voir. Elle s’était habillée très simplement, une petite robe pastel et un foulard noir dans les cheveux. Presque comme si elle avait voulu dissimuler sa chevelure aux magnifiques reflets auburn. Et ce regard, si clair, qu’elle évitait de braquer sur lui ! Il aurait pu passer des heures à la contempler ! Mais plus que tout, elle possédait un petit sourire timide, qui lui faisait le don de lui faire perdre tous ses moyens. Oui, décidément, Guillaume était sous le charme.
L’ouïe :
C’est le sens le plus utilisé après la vue. Inutile de rappeler que nous utilisons nos oreilles au quotidien : il suffit de discuter, taper sur son clavier ou même marcher pour s’en rendre compte. Très utilisés dans les films et séries, le son et les bruits participent à caractériser l’ambiance d’un lieu.
Mais peut-on l’utiliser différemment ?
Tout comme la vue, nous avons tendance à utiliser l’ouïe de façon réduite dans nos descriptions. Alors qu’il existe une infinité de sons, nous nous limitons souvent aux bruits qui dérangent notre personnage ou lors des dialogues.
Exemple : une sonnerie de téléphone, des cris, des pleurs, la musique, un grondement de tonnerre et tous les verbes de parole.
Comme pour la vue et le reste des autres sens, certains mots associés à ce sens te viendront avec facilité. Essaie de dépasser ce stade et d’enrichir ton vocabulaire.
Voici quelques idées pour y parvenir.
- Liste les différents types de bruit.
Tu peux utiliser ces exemples : vrombissement, brouhaha, clapotis, tapotement, claquement, soupir, craquement (feu, articulations, etc.), ronronnement, souffle, crépitement, grésillement, sifflement, ruissellement de l’eau, etc.
- Ajoute les termes liés au volume.
En voici quelques-uns : murmure, chuchotis, strident, hurlement, etc.
- Et ceux liés à la tonalité.
Par exemple : aiguë/grave, des basses, ténor, soprano, etc.
- Pense aux différentes sources de bruit.
Quelques idées pour t’aider : les bottes sur des pavés, les sabots des chevaux, les aboiements d’un chien, le hurlement d’un loup-garou, le vent dans les branches, une alarme, une sirène de la caserne des pompiers, etc.
- Et enfin, n’oublie pas le silence ! Une absence soudaine de bruit peut plonger ton lecteur dans une tension folle ! Écris tous les termes liés au silence ou à des sons très faibles. L’exercice est plus compliqué, car il est parfois difficile de décrire quelque chose qui n’existe pas. Pense dans ces cas-là à passer par la négation ou des métaphores.
Voici les plus basiques : silencieux, calme, sons étouffés, absence de bruits, etc.
Tu peux reprendre cette liste et chercher des mots spécifiques à chacune de tes scènes ou ambiances !
L’odorat
L’odorat, comme la vue ou les autres sens, a tendance à éveiller certaines images issues de l’imaginaire commun : on associe ce sens aux parfums, aux fleurs, à la nourriture chaude.
Pourtant, comme pour les autres sens, les possibilités sont infinies : il existe des milliers, si ce n’est des millions, d’odeurs différentes et chacun d’entre nous a son propre répertoire de senteurs, étroitement lié à nos expériences et émotions personnelles.
Pour mieux utiliser ce sens, voici donc quelques conseils :
- Prends conscience de l’importance et de l’impact des odeurs sur ton comportement.
Inspire-toi de la vie quotidienne : as-tu déjà remarqué qu’en passant devant une boulangerie, tu avais une subite envie de croissant ? Eh bien, certains magasins l’ont compris et n’hésitent pas à encenser les trottoirs pour vous attirer !
- Apprends à repérer quelles senteurs provoquent une réaction chez toi et entraine-toi à les décrire !
Sers-toi de tes expériences personnelles : un parfum te rappelle un souvenir heureux ? Une maison de vacances familiale ? Une personne aimée ? Comment le décrirais-tu ?
Voici un exemple : Je pénétrais dans l’appartement. Il était là. Ce parfum boisé, si familier, m’apporta un vague réconfort, aussitôt démenti par les larmes qui envahirent mes joues. Il avait tout représenté pour moi : la famille, la sécurité et, surtout, l’amour inconditionnel de mon grand-père. Je reniflai, comme pour mieux m’imprégner de l’odeur. Bientôt, elle disparaîtrait et, avec elle, les dernières traces de son existence. Sur une grande inspiration, je fermai les yeux et laissai la magie du parfum opéré. Il fut soudain là, à mes côtés et malgré les larmes qui coulaient, je sus que jamais je ne l’oublierai.
- Mélange les sens ! Tu verras ce conseil pour les 5 sens, mais je le trouve encore plus vrai lorsqu’il s’agit des odeurs. Car une odeur a le pouvoir de réveiller votre faim, d’attirer votre regard, d’éveiller vos désirs. Utiliser d‘autres sens pour décrire une odeur est donc un moyen efficace de montrer les sentiments de vos personnages !
Quelques idées : une odeur alléchante (goût), une odeur sucrée (goût), parfum écœurant (goût), la senteur de la terre humide (toucher), l’odeur de l’orage (émotion ou ouïe), le parfum de l’amour (sensation)/de la peur (toucher ou émotion), le parfum des montagnes (vue), l’effluve de la mer et du sel (goût/toucher), etc.
N’hésite pas à créer tes propres comparaisons : il sentait un mélange d’herbes fraîchement coupé et de coton propre.
Le toucher
C’est un sens auquel nous pensons plus rarement pour nos descriptions et pourtant ! Lié à d’autres sensations, comme la chaleur (ou son absence) et la douleur, le toucher à un effet immersif non négligeable !
Alors, comment l’utiliser ?
- Comme pour les autres sens, commence par prendre conscience de son importance dans ton quotidien.
Quelques pistes de réflexion : pour faire défiler l’écran et lire cet article, tu as dû utiliser ton doigt contre le pad de ton ordi ou la souris, non ? As-tu prêté attention à tes sensations ? Comment les décrirais-tu ? Et tes vêtements ? Les sens-tu ? Non, car ton cerveau a dû occulter en arrière-plan la sensation du tissu sur ta peau (imagine un peu si tu ressentais tout, tout le temps à pleine puissance ?). Mais si tu devais décrire cette sensation ? Sont-ils rêches ? Doux ? Grattent-ils ?
- Essaie de dresser une liste des sensations que tu peux ressentir en touchant un objet ou une personne : comment le décrirais-tu ? Pense en termes de matériaux, de chaleur, de consistance, etc. Aimes-tu ces sensations ?
Un début de liste : râpeux, lisse, doux, soyeux, rugueux, piquants, onctueux, grumeleux, chaud, froid, douloureux, tendus, brûlant, grattant, irritant, agréable, insupportable, etc.
- Pense aussi à toutes les expériences qui impliquent le toucher et ajoute-les à ta liste.
Par exemple : une aiguille qui transperce ta peau, un frottement qui te blesse, un pull qui gratte, un pli qui irrite, une barbe qui pique, un cheveu qui chatouille, etc.
Le goût :
Logique, certes, mais très limitant !
La majorité des écrivains utilisent le goût… Lorsque leur personnage mange !
Car le goût nous sert bien plus que nous ne le pensons ! (et puis ne dit-on pas que l’estomac est notre second cerveau ?)
Alors, quand et comment l’utiliser ?
- Commence par la base : le goût dans l’alimentation.
Ici, cinq mots risquent de te venir immédiatement en tête : sucré, salé, amer, acide, umami.
Mais ce n’est pas tout !
Il existe plein d’autres termes pour décrire le goût des aliments ! Essaie de dresser une liste.
N’oublie pas, tu peux aussi utiliser des comparaisons de ton cru pour l’étoffer ! Pour t’aider, pense à la texture (ici, tu mélanges le goût et le toucher) et à la sensation gustative !
Un peu de vocabulaire : huileux, fumé, piquant, croustillant, farineux, onctueux, rafraîchissant, corsé, fruité, poivré, citronné, fermenté, caoutchouteux, âpre, cendré, terreux, ferreux, juteux, etc.
⇒ Par texture : onctueuse, filandreuse, craquante, fondante, visqueuse, râpeuse, etc.
⇒ Par sensation gustative : astringent, acidulé, épicé, etc.
- Tu peux poursuivre ta liste en dressant les cas où le goût peut être utilisé dans d’autres circonstances : quelles émotions peuvent entraîner un goût ou une sensation dans la bouche ?
Quelques idées : une bouche sèche (nerveux), un goût amer (regrets, déception), un goût de fer (s’il saigne), un goût âpre (remords), etc.
- Tu peux aussi jouer sur le sentiment de goût/dégoût de ton personnage pour décrire des personnes ou des objets :
Exemple : un physique appétissant, un objet peu ragoûtant, un visage hideux qui écœure (oui, c’est assez violent comme description.), etc.
- Enfin, tu peux écrire des comparaisons qui utilisent les aliments pour stimuler le goût chez ton lecteur :
En voici quelques-unes : belle à croquer ou beau comme une pomme, avoir une peau de pêche, avoir les yeux en amande, etc.
Comment s’entraîner à utiliser les 5 sens dans les descriptions ?
Voici quelques idées d’exercices pour vous entraîner !
Quel est ton sens dominant ?
1 — Prends une scène fixée en avance : une rando en montagne, dix minutes à ton bureau, ton arrivée sur une plage, etc. Tu peux, si cela t’aide, utiliser une photographie ou un passage d’un film.
Tu manques d’idées ? Commence avec l’image ci-dessous :
2- Décris la scène comme elle te vient.
3- Munis-toi de crayons/surligneurs de 5 couleurs (ou plus) différentes.
4- Surligne un passage à chaque fois que tu as utilisé un sens. Par exemple, la vue en bleu, l’ouïe en vert, le toucher en orange, le goût en rose et l’odorat en jaune. 5- Compte le nombre de fois où tu as utilisé chaque sens. Y en a-t-il un qui ressort plus que les autres ? Ou deux ?
6- Tu viens d’identifier ton ou tes sens dominants ! Refais l’exercice avec une autre scène si tu veux une confirmation !
7- Reprends la scène précédente et réécris-la. Mais cette fois, concentre-toi sur les sens que tu as le moins utilisés. Réfléchis à la manière dont ils pourraient s’insérer dans la scène et l’enrichirent. Qu’est-ce qui pourrait stimuler ton ouïe, ton toucher, ton odorat, ton goût ?
Essaie de les répartir dans ta scène.
8- Compare tes deux textes. Que constates-tu ?
Conseil : si l’exercice de réécriture te paraît compliqué ou que le résultat ne te paraît pas probant, ne désespère pas ! C’est normal d’avoir un peu de mal au début et par conséquent, ta seconde description peut paraître artificielle. Mais tu verras, à force de pratiquer, ton récit sera bien plus immersif en utilisant tous les sens !
Pars en exploration !
Cet exercice paraît simple au début, mais tu verras qu’il peut être bénéfique une fois seul.e devant ta feuille (ou ton écran) blanche.
1— Prends un cahier et un stylo (ou votre smartphone) et pars te balader. Inutile d’aller bien loin : ton appartement suffit !
2- Concentre-toi sur la vue. Écris tout ce que tu observes, pêle-mêle, sans chercher à faire des phrases. Le but, ici, n’est pas d’obtenir une description captivante, mais de te forcer à réfléchir au vocabulaire et à tes sensations.
3- Une fois que tu as l’impression d’avoir épuisé ton inspiration, passe à une deuxième feuille et recommence ! (Oui, oui, vous avez bien lu !).
Mais cette fois, essaie de noter tous les détails auxquels tu n’avais d’abord pas prêté attention :
Une déchirure sur un coussin, une tache sur la nappe, la lumière vacillante du plafonnier, le reflet de tel ou tel objet sur le mur, les reflets des poils de ton chat, etc.
4- Note les mots ou les expressions qui te semblent intéressantes.
5- Félicitations ! Tu as enrichi ta fiche sur la vue.
6- Recommence de façon régulière et dans différents environnements pour continuer d’améliorer ton vocabulaire et de t’habituer à creuser plus loin !
7- Refais ce jeu avec les autres sens : l’ouïe, le toucher, l’odorat et le goût !
Conseil : pense aussi à décrire l’absence de perception : le trou de lumière, l’absence de sensations, etc.
Mémé Gertrude ou petite Julie ?
Dans cet exercice, tu vas apprendre ou réapprendre à utiliser les 5 sens pour caractériser un personnage.
1- Choisis deux ou trois personnages. Plus ils auront des différences notables en termes d’âge, de comportements, de perceptions de l’univers, plus l’exercice sera facile. Note leur fonctionnement, leurs caractéristiques, et la manière dont ils ressentent le monde. Ont-ils des handicaps. Par exemple, portent-ils des lunettes ou entendent-ils correctement ?
2- Choisis un décor unique : un jardin, la plage, un supermarché, etc.
3- Décris ce lieu du point de vue de chacun des personnages en utilisant les 5 sens. Ne mets pas les prénoms et donne le moins d’indications physiques sur tes personnages. L’idéal est d’utiliser uniquement les pronoms personnels. (Tu comprendras pourquoi au point suivant.) ⇒N’oublie pas que certains personnages seront plus auditifs, plus tactiles, plus gourmands que d’autres !
4— Relis ou fais relire tes petits textes. Le lecteur parvient-il à savoir de quel point de vue la scène est présentée ? (S’il y avait eu le prénom ou trop d’indications sur le sujet, l’exercice serait biaisé).
5— Si le lecteur ne parvient pas à identifier le sujet, demande-toi quelles en sont les raisons. As-tu choisi des personnages suffisamment différents ? As-tu assez joué sur les cinq sens ? Un personnage gourmand aura tendance à penser en termes de goût, un olfactif en termes d’odeurs, etc.
6- Tu peux refaire l’exercice avec d’autres personnages.
Quelques conseils :
N’hésite pas à commencer dans la simplicité, en prenant, par exemple, une grand-mère et un enfant. Les différences de point de vue se ressentiront ainsi sur d’autres points de ton texte et cela facilitera l’exercice.
Exemple : l’avis sur la technologie varie entre une grand-mère qui n’a jamais appris à s’en servir et son petit-fils qui est naît avec !
Si tu trouves l’exercice facile, passe à l’étape suivante : choisis des personnages proches en âge, peut-être même amis. Ils conserveront forcément des points de différences (personne n’est identique), mais l’exercice se compliquera.
Absence de sens
Dans cet exercice, il s’agit de te forcer à écrire en interdisant l’utilisation d’un sens !
Le but est simple, te faire prendre conscience de l’importance du sens absent et t’habituer à composer avec les autres !
1— Choisis le sens interdit ! (Pas sur la route hein ! c’est dangereux ! ;))
2— Trouve une explication pour que ton personnage se retrouve amputé de ce sens : problème de vue, d’ouïe ou autre. (Inutile de chercher compliqué pour l’exercice.)
3- Choisis une scène qui te plaît. Il peut s’agir d’une scène de ton roman, d’un bout de film, ou d’une scène inventée spécialement pour l’occasion (mais tu dois savoir ce qu’elle contient avec certitude).
4- Décris la scène SANS utiliser le sens interdit.
5- Alors ? Était-ce difficile ? Pense à noter les nouvelles expressions ou les nouveaux mots employés durant cet exercice !
6- Recommence : même scène, sens différent !
Warning
C’est le bazar !
Enrichir ses scènes en utilisant les cinq sens, c’est bien. Mais donner trop de détails, peut être préjudiciable.
En effet, si tu surcharges ton texte d’informations, le lecteur risque de ne pas arriver à tout assimiler et peut se retrouver perdu !
Ou pire : s’ennuyer !
Car si tu lui donnais ab-so-lu-ment tous les détails d’une scène ou d’un personnage, il n’a plus qu’à accepter cette description et passer à la suite. Il adopte alors une attitude passive, qui peut vite le conduire à reposer le livre sur l’étagère pour l’y oublier !
Alors, comment éviter ça ?
Comme souvent, c’est une question d’équilibre. Sélectionne certains points sur lesquels tu souhaites insister. Par exemple, trois ou quatre détails de la scène ou du personnage qui sortent du lot et utilisent au moins deux sens différents.
Exemple : la mousse qui envahit les pieds des tables. L’odeur d’algues qui va avec. La moiteur de la pièce.
Focalise-toi sur ces points et laisse l’imagination de ton lecteur compléter le reste de la scène !
Conseil pour les perfectionnistes (dont je suis) : Dis-toi que ton lecteur n’aura jamais la même scène que toi en tête. Aussi précise que soit votre description, il verra ce que son cerveau (et donc son expérience, ses ressentis, ses émotions) lui fera voir.
Autant accepter dès le début et ne pas tout décrire.
Ton lecteur vous en sera reconnaissant en poursuivant sa lecture !
Ciboulot en surchauffe !
Les conseils donnés dans cet article sont à prendre avec modération.
Utiliser les cinq sens, c’est bien, mais caser systématiquement la vue, l’ouïe, l’odorat, le goût et le toucher… Ça peut faire beaucoup !
Il faut répartir l’utilisation des sens sur l’ensemble du roman.
Si une scène n’utilise pas le goût, et bien soit ! Tu essaieras de le mettre plus tard (ou pas) !
Jouer avec les cinq sens est un bon moyen pour rendre vos descriptions immersives, mais, comme tout en écriture, ce n’est pas une obligation ! Alors, penses-y, mais ne t’épuise pas à les placer tous dans toutes tes scènes !
Panne sèche !
Tu as essayé d’utiliser d’autres sens, mais tu passes des heures à réfléchir et tu n’avances plus ton premier jet ?
Pas de panique !
Enrichir tes scènes avec d’autres sens n’est pas un exercice facile et il est normal de galérer un peu, surtout au début ! Il ne faut en aucun cas rester bloqué.e dessus !
Tu n’arrives vraiment pas à utiliser l’odorat, le goût et le toucher lors du premier jet ? Eh bien, tu pourras toujours revenir sur certaines descriptions à la réécriture ou même à la correction pour améliorer ton texte !
Comme tout apprentissage, insérer les cinq sens dans ton récit te demandera de moins en moins d’énergie à mesure que tu t’entraîneras. Alors, inutile de te dégoûter de l’écriture — ce serait bête ! — prends ton temps.
Pour aller plus loin…
Les cinq sens ne te suffisent pas ?
Ajoute d’autres perceptions : la magie, l’intuition, la divination, le magnétisme, l’énergie, etc.
Certains personnages peuvent aussi voir le monde d’autres manières : à travers le mouvement, par exemple.
Tu as largement de quoi t’amuser !
Tu en as vraiment assez des sens, des perceptions et tout ça ? Il existe bien d’autres manières de rendre ton récit immersif.
Nous les verrons dans de prochains articles, mais je peux déjà te donner quelques exemples : utilise le mouvement ou les émotions de tes personnages, colore tes verbes. (cf. l’article sur les verbes pauvres, etc.)
Conclusion
Nous percevons le monde à travers un ou deux sens dominants. Ces sens ressortent largement dans notre façon de décrire une scène ou un décor lorsque nous écrivons.
Pourtant, nous possédons tous cinq sens que nous utilisons au quotidien. Prendre conscience de leur importance et de leur impact sur nos vies, te permettra de mieux comprendre comment les insérer dans votre texte, afin de créer une ambiance en 5D, plus immersive pour votre lecteur !
Alors, n’hésite pas à te créer des listes de vocabulaire, à mélanger les sens, à jouer sur les nuances et les dosages pour décrire au mieux l’ambiance de tes lieux !
Liens intéressants
Sources
Voici les articles que j’ai utilisés pour écrire ce post. N’hésite pas à aller les consulter !
https://www.laurencesmits.com/comment-ecrire-avec-les-5-sens/
https://beta-lecture-and-co.fr/blog/auteur-e-s-etes-vous-passe-a-la-5-d-pour-ecrire-vos-scenes/
2 réponses à “Des descriptions captivantes grâce aux cinq sens !”
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[…] Vous souhaitez apprendre à écrire des descriptions captivantes grâce aux cinq sens ? Par ici ! […]
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Great article.
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Thank you !
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